Association des Centres Educatifs
& de Sauvegarde des Mineurs et Jeunes Majeurs
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En 2021, le tribunal de Blois a terminé la procédure pour 366 divorces contentieux. 121 nouvelles affaires ont aussi été enregistrées, alors que 288 dossiers sont en cours, avec un délai moyen de jugement de deux ans (24,7 mois), les juges aux affaires familiales étant particulièrement sollicités. Les divorces difficiles deviennent fréquents et trouver une solution peut mettre parfois beaucoup de temps. D’autant plus quand des enfants sont sous influence.

 

L’aliénation parentale un terme à manier avec précaution.

À ce sujet, un terme revient régulièrement : celui d’« aliénation parentale », qui décrit une situation grave, mais qui peut être employé à tort et à travers. « C’est plutôt rare, confirme Annabelle Poulleau, psychologue à Saint-Ouen. Cela a été développé médiatiquement, vulgarisé à outrance. C’est parfois lié à un certain type de personnalité, on rencontre des cas de manipulation narcissique, avec un enfant qui devient l’objet du conflit pour faire du mal à l’autre. Généralement, on le voit assez rapidement, soit en discutant avec les parents, soit avec l’enfant dans le cadre sécurisant de la consultation. Mais certaines histoires sont des vrais cas de conscience, il m’arrive d’en parler avec des collègues pour avoir un avis extérieur. »

Dans les procédures de divorce, les juges peuvent s’appuyer sur les expertises des psychologues. Les avocats ont aussi un rôle à jouer selon le bâtonnier Alexandre Godeau, qui intervient notamment en droit de la famille. « On a des situations qui peuvent être dramatiques.

Quand il y a un vrai blocage, on arrive aux limites du système. Les outils sont là mais il manque parfois des maillons pour régler les problèmes. » Il évoque notamment un dossier récent dans lequel il est intervenu : « Cela fait deux ans que ça dure. Il y a un conflit entre les deux parents et la mère se sert de l’enfant pour faire du mal au père. L’enfant est piégé, il ne peut plus émettre de souhait. Au cours de la procédure, le père a finalement obtenu des droits de visite, mais qui n’étaient pas respectés. Si bien qu’au final, l’enfant a été placé en foyer. C’est un échec, même si nous sommes en train de gagner des droits d’hébergement. Il y a de plus en plus de mesures de placement, et pas seulement liés à des carences éducatives. Le conflit parental en lui-même peut parfois être considéré comme un danger. »
L’avocat et la psychologue sont d’accord sur la solution à adopter pour éviter ce genre de situations dramatiques. « Il faut anticiper, juge le bâtonnier. On doit rappeler au client le contenu de l’autorité parentale. L’aspect conseil est très important dans les affaires familiales, on ne peut pas prendre un dossier comme il vient. »
« Il est important de rester dans la neutralité, ajoute Annabelle Poulleau. Il ne faut pas que les parents perdent de vue qu’ils se sont choisis. L’enfant, lui, doit être recentré au cœur du couple. Parfois, ils vivent mal un divorce quand les choses sont mal expliquées. »

 

Les cas de divorce douloureux évoqués ci-dessus ne sont pas nécessairement les plus nombreux. Dans les séparations, si l’étape justice est obligatoire pour qu’un acte soit établi, les deux parties peuvent arriver à un accord par le biais de la médiation. Une alternative qui n’est pas nouvelle mais pas forcément bien connue, les couples en question ayant plus souvent « un réflexe juridique, même si les tribunaux sont saturés » comme l’indique Maëlle Guiggia, médiatrice au sein de l’Association des centres éducatifs et de sauvegarde des mineurs et jeunes majeurs (Acesm) à Blois.
« On travaille sur le dialogue et la communication, poursuit-elle. Il s’agit de passer au-delà du conflit. Souvent, la question conjugale parasite la question parentale, il y a des choses qui ne sont pas réglées. Mais ce n’est pas forcément simple, ça demande de se mouiller un peu et aussi d’entendre l’autre. Parfois, deux personnes ne peuvent même pas rester ensemble dans la même pièce. »

Tout le monde peut faire appel à un médiateur, un juge peut aussi le proposer dans le cadre d’une procédure de divorce. Mais avant de débuter les séances, les deux personnes concernées doivent avoir donné leur accord.

Deux médiateurs diplômés exercent dans le département de Loir-et-Cher, ils sont basés à Blois mais effectuent des permanences à Vendôme et Romorantin. Ils disposent de compétences en psychologie et en droit. Ils ne reçoivent pas d’enfants, mais dans certains cas de jeunes adultes. Au total, 403 personnes ont participé à des séances de médiation en 2019, et 386 en 2020, malgré le confinement.
« Nous avons des objectifs en termes de nombre de rendez-vous fixés, mais pas de résultat. Lors de chaque première réunion, on explique comment vont se dérouler les séances. Tout ce qui est dit dans un espace de médiation est secret, notre rapport au juge est rédigé sur la forme, pas sur le fond. Il ne s’agit pas de chercher qui a tort ou raison, l’important est ce que chacun pense. Les personnes ne sont pas forcément d’accord en sortant, mais au moins elles se sont entendues. »
Les médiateurs interviennent désormais aussi au tribunal de Blois les jeudis et vendredis matin. Le but est de rendre le dispositif accessible à tous, en pratiquant une tarification adaptée aux moyens de chacun (de 2 à 131 € par séance), l’entretien d’information étant gratuit.

 

Source : La Nouvelle République du Mardi 8 Février 2022 (https://www.lanouvellerepublique.fr/loir-et-cher/la-mediation-alternative-encore-meconnue)

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